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Carnet spécial d'une kiné et d'une patiente
16 mai 2013

Le GBS concernant la phytothérapie et l'allopathie

"C'est bon, ce ne sont que des plantes"

"C'est naturel, pas comme tout ces produits chimiques"

"L'avantage, c'est qu'on peut en prendre, y'a aucun souci"

 

3

 

Que le pharmacien ou le médecin qui n'a jamais entendu une de ces affirmations se dénonce...bon personne? J'en vois déjà certains faire des bonds de 30 centimètres sur leur chaise à la lecture de ceci.

Je vous avertis directement et précisément: je ne suis ni pharmacien, ni médecin, je suis juste une kiné et une patiente (enfin de moins en moins). A ce titre, je donne un avis personnel fondé sur le GBS* et mes quelques lectures et connaissances acquises par simple curiosité. (non, ce n'est pas qu'un vilain défaut, cela peut être une réelle ouverture d'esprit).

Si l'on reprend l'histoire de la médecine, au début étaient les simples. Pas les simples d'esprits mais les simples médecines. Les abbayes, les châteaux possédaient leur jardin potager pour se nourrir mais une partie était consacrée à la culture des simples, des plantes susceptibles de soigner. A l'époque, il faut bien imaginer que ces connaissances ont été acquises de manière empirique sur le long terme. Ce n'était pas de l'evidence base medecine, ce n'était pas de l'étude randomisée multicentrique en double aveugle contre traitement de référence ou placebo, juste une observation de la nature. Ses plantes comportait aussi bien des antalgiques que des émétiques (utilisé sur les empoisonnements) avec plus ou moins de bons résultats. On savait que cela pouvait marcher mais on ne savait pas comment.

Je passe sur l'obscurantisme de la médecine basée sur les clystères et les saignées, la nature guérissait quand les médecins n'arrivaient pas à tuer leurs patients. Le véritable progrès vient avec le développement d'autres sciences comme la chimie et la biochimie en parallèle du développement de la médecine et de la physiologie et physiopathologie. Ainsi, on a pu étudier les plantes et déterminer la notion de principes actifs, à savoir la ou les molécules contenue(s) dans la plante et susceptible(s) de soigner. L'extraction de ces substances a permis d'introduire les poudres, comprimés, gélules, décoctions de tout ou partie de la plante...

La plante contient la ou les substances actives ainsi que d'autres substances dont certaines peuvent être mauvaises à long terme ou à haute dose. Ainsi des traces plus ou moins importantes de métaux lourds peuvent être retrouvées. On ne peut extraire de la plante que toutes les substances. De plus, si l'on peut déterminer un grammage de plante à absorber, on ne peut déterminer la quantité exacte de principes qui sera ingérée/administrée. Et ce parce que la plante contient plus ou moins de principes actifs suivant son âge, son sol, sa géographie, sa saison de récolte, sa conservation après récolte. Tous ces paramètres mis bout à bout donne une marge d'erreur dans l'administration au fond assez grande pour devenir au mieux inefficace, au pire dangereux. La nature fait bien les choses, c'est souvent l'être humain qui fait des bêtises.

Le développement de la chimie a permis la fabrication de médicaments dits allopathes. Il ne s'agit plus d'extraire le principe de la plante mais de fabriquer la molécule active. Cela a deux avantages: avoir un dosage beaucoup plus précis et un taux de pureté contrôlée..je me souviens d'un étudiant en chimie qui, en TP, les lendemains de soirées un peu arrosées, fabriquait son propre aspirine avec un taux de pureté permettant de faire un trou dans les chaussures et les estomacs. Je ne cautionne absolument pas cette manière de faire, il vaut mieux aller chez son pharmacien et prendre conseil.

Les égyptiens antique avaient découvert que l'écorce d'un arbre mis en décoction était un puissant anti-inflammatoire, il l'utilisaient souvent et avaient déterminé les cas où cette plante devait être administrée. La chimie moderne a permis de déterminer que le principe actif était l'aspirine et maintenant, nous sommes capables de produire de manière industrielle ce médicament avec un taux de pureté excellent et en connaissant la dose exacte par comprimé / sachet / gélules.

On tend à opposer allopathie et phytothérapie alors que les deux sont intrinsèquement liées. Les deux sont basées sur la notion de principes actifs. Et comme tout principe actif, il peut y avoir des interactions. En allopathie, le médecin et le pharmacien sont les garants que vous n'allez pas faire des croisements dangereux. Dire qu'il n'y a pas de contre indications ou d'interactions à la phytothérapie est absurde et dangereux. Une plante peut être aussi dangereuse qu'un médicament si mal administré et sans aucun contrôle par un professionnel de santé. Il ne viendrait à personne l'idée de manger un champignon vénéneux, la même précaution devrait être prise pour toute phytothérapie.

De même, une plante peut être contre-indiquée du fait même de son principe actif en raison de la présence d'une pathologie pré-existente, tout comme un médicament.

Prendre un médicament phytothérapique en association avec un traitement allopathique peut être tout aussi délétère. Il y a eu un exemple récent concernant la prise de statines (je ne suis pas à même de juger de la légitimité ou non des statines, je précise, je n'y connais rien là dessus) en association avec le jus de pamplemousse (oui, celui là même que l'on achète en supermarché) ou encore un autre qui me touche un peu plus concernant la prise d'extrait de pépin de pamplemousse avec des tétracyclines (potentialisation des effets et néphrotoxicité).

La phytothérapie est une base de travail pour l'allopathie. Des recherches médicales ont encore lieu pour trouver de nouvelles molécules, de nouveaux principes actifs issu des plantes. Ces deux branches de la pharmacie ne doivent donc pas être opposées à mon avis. Il peut exister un traitement phytothérapique qui n'existe pas en allopathie mais cela doit rester basé sur de la science avec les mêmes contraintes et non de l'alchimie ou de la tradition.

Il y a alors les tenants d'une médecine à base de plantes qui invoquent un retour à la nature et de l'autre les tenants du tout-médicament. Ces deux extrêmes ne se basent que sur leur propre expérience et leurs propres croyances.

Pour ma part, plantes ou médicaments, il y a des principes actifs qui doivent nous amener à être circonspect dans leur prise et leur administration. Les positions extrêmes n'apportent rien, seule la science et ce p*t*in de GBS* doivent prévaloir. Et pour rappel, les médecins et les pharmaciens connaissent les principes actifs, les interactions, les indications et contre-indications.

Bon...qui veut une tisane?

 


 

* GBS pour Gros Bon Sens (cf ici)

 

 

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